Imad Mohamed Amine
Journaliste, analyste politique
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Alors qu’Alger et Bamako se portent des accusations devant la communauté internationale, il serait utile de connaitre le coût financier et humain de la présence de Wagner à Bamako.
Lors d’une réunion vendredi 30 août du Conseil de sécurité de l’ONU à New York sur la fourniture des armes par les pays occidentaux à l’Ukraine, le représentant du Mali a fermement répondu au voisin algérien. Car Alger avait accusé un drone malien d’avoir tué une vingtaine de civils dans le nord du Mali.
« Accusation aussi grave qu’infondée », ce sont les mots du représentant du Mali à l’ONU pour répondre à un diplomate algérien. Celui-ci a récemment affirmé avoir appris qu’un drone de l’armée malienne a effectué une frappe dans le nord du Mali, tuant une vingtaine de civils.
L’ambassadeur malien Issa Konfourou, dans son intervention devant le Conseil de sécurité, a poursuivi « En colportant à la légère ces informations de presse non vérifiées, le diplomate algérien se fait le relai de la propagande terroriste dans notre région. »
Le Mali martèle que ce sont bien des terroristes qu’il a éliminés fin août dans le Nord, non loin de la frontière algérienne. Devant le Conseil de sécurité, le diplomate malien a également publiquement demandé à son grand voisin algérien d’adopter une attitude « plus constructive et plus respectueuse du Mali et de son peuple ».
Alger et Bamako en froid depuis la fin de l’accord de paix d’Alger
En janvier 2024, dans une déclaration, la junte malienne a officiellement déclaré caduc l’accord de paix d’Alger signé entre le Mali et les rebelles, avec « effet immédiat ».
Cette décision a été perçue comme un reniement de l’Algérie et de ses efforts pour pacifier le Mali depuis 1991. Lors de la grande rébellion du MNLA de 2011, Alger a été la première à prendre position contre la partition du Nord-Mali, alors que la communauté internationale observait les choses d’un oeil désintéressé.
Lors des trois grandes rébellions du nord, en 1991, en 2006 et 2014-15, c’est Alger qui a réuni les belligérants et réussi à faire signer la paix entre les Maliens.
Le colonel Goïta s’est rendu coupable vis-à-vis d’Alger d’un type de lèse-majesté politique qu’aucun de ses prédécesseurs n’a osé commettre, tant le respect de Bamako pour Alger était infini.
L’arrivée des Russes de Wagner a « gonflé » le colonel Goïta
L’arrivée des mercenaires du groupe russe Wagner dans le septentrion malien, dans une région qui a une frontière avec l’Algérie n’a pas arrangé la situation.
Les exactions commises par les Russes ont alimenté les tensions et nourri les craintes des populations du Nord-Mali, voisines de l’Algérie. Beaucoup de tribus ont plié bagages pour venir s’installer carrément en Algérie et en Mauritanie, ou à la lisière des frontières communes pour fuir Wagner et les armées loyalistes.
On sait que le coût financier de Wagner est très élevé, ce qui a contraint les autorités à mettre la mine d’or d’Intahaka à Gao sous l’autorité des Russes. Ces mêmes Wagner se sont distingués par un appétit insatiable pour tout ce qui est or; quitte à semer la mort et la dévastation sur le chemin. C4est ce qu’il ont fait dans plusieurs pays d’Afrique, dont le Soudan et le Centrafrique. La présence des Russes au Soudan a été rendue possible grâce au chef de guerre Mohamed Hamdane Doglo « Hametti », qui leur permet, moyennant leur aide logistique, de piller l’or du pays.
Au Mali, Koulouba semble se plier au même principe: aide contre or; d’ailleurs, l’armée malienne et le groupe russe Wagner ont conjointement investi la mine d’or d’Intahaka, un vaste site d’orpaillage artisanal niché dans le gourma malien, à environ 80 kilomètres au nord de Gao.
On se souvient de ces propos du président Abdelmajid Tebboune : « l’argent que coûte cette présence serait mieux placé et plus utile s’il allait dans le développement du Sahel ».
Un sujet qui agace les Maliens eux-mêmes…