Somalie, Libye, Tchad…ces pays où l’accès à l’eau demeure faible en Afrique. Pis encore, parfois l’accès à l’eau est une quête mortelle.
Sur 54 pays en Afrique, 13 pays souffrent toujours d’une grave insécurité hydrique selon un rapport publié en 2023 par l’Institut pour l’eau, l’environnement et la santé de l’université des Nations unies (ONU), malgré les efforts et les investissements consentis aux cours des dernières années pour améliorer le taux d’accès à l’eau, notamment l’eau potable.
L’accès à l’eau demeure faible en Afrique
Les Comores (19%), la Somalie (25%), la Libye (30%), l’Érythrée (35%), Djibouti (52%), l’Éthiopie (52%), la Sierra Leone (53%), le Tchad (53%), Madagascar (54,4%), le Sud-Soudan (55%), le Niger (56%), le Soudan (60%) et le Liberia (76%).
Ce sont les 13 plus mauvais élèves en matière d’accès à l’eau en Afrique sur 54 pays, selon un rapport publié en 2023 par l’Institut pour l’eau, l’environnement et la santé de l’université des Nations unies (ONU). Les raisons de cette pauvreté hydrique vont de la croissance démographique et économique, aux conflits, en passant par les effets du changement climatique.
Au Comores par exemple, cette situation a conduit en novembre 2023 au soulèvement des populations de Moroni, qui ont également relevé le problème de la vétusté des réseaux de distribution d’eau dans la capitale comorienne. .
Idem chez son voisin la Somalie, où au moins 54 personnes ont perdu la vie entre janvier et mars 2024 à cause du choléra, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’Organisation des Nations unies (ONU). L’Organisation mondiale de la santé (OMS) précise quant à elle que 62% des décès concernent des enfants de moins de 5 ans.
Dans le pays d’Afrique de l’Est, 28% des familles ne disposent pas d’installations sanitaires fonctionnelles, tandis que 34% pratiquent la défécation à l’air libre et que 80 % n’ont pas d’installations hydrauliques pour se laver les mains. D’où le besoin urgent en eau potable et d’installations sanitaires pour éviter que l’épidémie de choléra ne se propage davantage. Mais, le pays reste pour l’heure tributaire des forages stratégiques, seules sources d’eau disponibles pour les communautés rurales pendant les longues périodes de saisons sèches. Près de 90 % des Somaliens font face à de graves pénuries d’eau.
Et dans l’ensemble de la sous-région Afrique de l’Est, cette infection diarrhéique aiguë a fait plus de 200 000 cas, dont plus de 3 000 décès seulement pour l’année 2023, selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).
La perte de la productivité agricole
Le secteur agricole malgache est également menacé par les pénuries d’eau, aggravées par les épisodes de sécheresse, principalement dans le sud de l’île. Les conséquences directes sont la perte de la productivité agricole.
En janvier 2023, la barre des personnes en situation d’insécurité alimentaire élevée dans le pays d’Afrique de l’Est a d’ailleurs franchi les 2 millions, notamment dans les régions du sud et du sud-est de Madagascar, où ce secteur représente aussi le pilier de l’économie. En effet, le sud de Madagascar subit le climat le plus sec de l’île : la pluie y est si rare que certaines zones peuvent être qualifiées de déserts. Et pourtant, sur le reste du pays, la saison sèche s’étend d’avril à octobre (ou de mai à septembre dans le nord), sauf sur la côte orientale, où il pleut toute l’année.
Au Tchad aussi, où 78 % de la population vit directement ou indirectement de l’agriculture, le manque d’eau menace le secteur agricole. Dans ce pays d’Afrique centrale, cette situation est à l’origine de l’insécurité alimentaire de 5,7 millions de personnes dont 2,1 millions se trouvant dans une situation très critique, indiquait encore l’ONU dans un rapport paru en octobre 2023.
D’importants chantiers à mener
Outre les conflits, la prolifération des maladies d’origines hydriques ou encore la famine, les pénuries d’eau peuvent également entraîner les migrations forcées, la perte de la biodiversité, etc.
Selon Loïc Fauchon, le président du Conseil mondial de l’eau, le changement repose sur trois piliers à savoir la connaissance, la finance et la gouvernance. La connaissance permettra d’innover dans la mise en place de solutions alternatives pour améliorer l’approvisionnement en eau potable et d’irrigation (dessalement, réutilisation des eaux usées traitées), et de digitaliser les installations d’eau pour éviter le gaspillage.
Il faudra aussi accorder davantage de financement au secteur de l’eau. C’est à cette condition seule que pourront être construites de nouvelles installations. Le troisième pilier est la gouvernance, qui doit garantir un partage équitable et une transparence totale.
Les Comores, qui ambitionnent par exemple de porter à 67 % son taux d’accès à l’eau potable d’ici à 2027, contre 19 % actuellement devraient tenter cette approche, qui sera également présentée au 10e Forum mondial de l’eau qui se poursuit à Bali en Indonésie. En Libye, le gouvernement veut également sécuriser ce service essentiel où le déficit en eau potable est estimé à 580 000 m3 par jour. Le pays d’Afrique du Nord a besoin de 2 millions de m3 d’eau par jour pour satisfaire la demande de ses populations.
L’autre solution serait peut-être de renforcer la sensibilisation et l’éducation, elles aussi essentielles pour résoudre la crise de l’eau sur le continent africain. En effet, pour faire face aux pénuries d’eau, il est nécessaire de reformer radicalement toutes les formes de consommation, de l’usage individuel aux chaînes d’approvisionnement des grandes entreprises.
Inès Magoum
Afrik21